BalmeLe Citoyen : Vous avez annoncé lors du repas du Citoyen, ce dimanche 7 septembre que vous vous retiriez définitivement de la politique locale. On a du mal à y croire !

René Balme : J’avais décidé que je prendrai ma retraite à 65 ans quoi qu’il arrive. Les élections de mars 2014 ont précipité les choses mais ne remettent pas en cause ma décision. J’aurai préféré, biens sûr, passer la main et me retirer dans d’autre conditions. Le PS, les Verts et le PRG en ont décidé autrement, eux qui ont délibérément pris le parti de faire gagner la droite en mars dernier.

LC : Comment peut-on mettre un terme à plus de 30 ans de vie politique locale et nationale après avoir tant innové et été pionnier dans de nombreux domaines ?

RB : J’ai donné 31 ans de ma vie à ma ville et à ses habitants. Nous avions réussi a faire de Grigny, un véritable laboratoire d’idées et un modèle de gestion participative. Je ne citerai pas, ici, tout ce que nous avons fait au cours des 22 ans ou j’ai été maire. La liste serait longue et je sais que certains feront en sorte que cette histoire qui a été écrite avec les différentes municipalités progressistes que j’ai conduites soit connue du plus grand nombre. Et ce, malgré la volonté manifeste de la nouvelle municipalité en place de vouloir faire table rase, y compris en changeant le nom de la ville !

Pour revenir à votre question, je ne suis pas de ceux qui considèrent qu’il seraient irremplaçables. Il y a la relève et je fais pleinement confiance à nos collègues de l’opposition Front de Gauche pour relever le défit… et reprendre la ville en 2020.

Pour ce qui me concerne, je m’étais donné jusqu’au mois de septembre pour murir une décision. Elle est définitivement prise : je quitte la politique pour me consacrer, à ma famille et à des activités que je n’ai pas pu mener au cours des 30 dernières années. Et donc, sauf si une situation exceptionnelle se produisait, je me mets définitivement en retrait.

LC : Vous avez décidé d’accorder cet entretien en exclusivité au Citoyen, c’est assez symbolique non ?

RB : Je me réjouis de ce que le Citoyen m’ait tendu son micro pour publier cet entretien. Pour être honnête, les médias ne se sont pas bousculés depuis le mois de mars et le téléphone est étrangement silencieux. Ce qui me va bien du reste, car, l’avantage de ne plus être un homme public et un élu du peuple, c’est que je peux, enfin, décider à qui je veux parler, à qui je veux dire bonjour, à qui je veux répondre au téléphone, etc. Une liberté totale. Aucune obligation. Aucune contrainte.

LC : Mais passer d’une activité débordante à cette espèce de solitude qui caractérise, en général, la retraite, ce doit être particulièrement déstabilisant !

RB : Pas du tout. Passé le choc de la défaite qui a du durer une quinzaine de  jours, je me suis vite adapté à ma nouvelle vie et je n’ai que très peu de temps libre. Il faut dire que j’étais particulièrement bien entouré ! J’ai toujours dit qu’il y avait une autre vie en dehors de l’activité municipale et j’en fais la démonstration aujourd’hui. Parfois, je me dis, que j’aurai du décrocher plus tôt pour prendre du bon temps. J’ai pris beaucoup de recul depuis le mois de mars, notamment au regard de la faculté d’oubli que peuvent avoir un très grand nombre d’habitants de le commune. Et croyez-moi, ce ne sont pas ce que l’on a le plus aidé qui sont le plus reconnaissants.

LC : La nouvelle municipalité est en passe de tout mettre en œuvre pour effacer votre passage. Elle est en train de saborder ds équipements phares comme le Centre de Santé, la démarche participative, la résidence d’auteur, etc. Quel est votre sentiment ?

RB : Je pense que ce genre de comportement est un aveu cinglant de faiblesse et la démonstration que l’équipe de Monsieur Odo a été élue sur la base d’un programme inexistant. La gestion depuis mars ressemble à de l’amateurisme doublé d’un esprit revanchard qui ne grandit pas cette équipe. En effet, la grandeur d’un homme politique ou d’un élu, c’est avant tout d’être au service de sa population, de mesurer ses besoins afin d’y répondre au mieux et de reconnaître le bien fondé des réalisations initiées par ses prédécesseurs en matière de service public notamment.

Ce n’est pas ce qui se passe à Grigny et je le regrette, pour les Grignerots bien sûr, mais aussi pour les anciens élus qui se sont donnés sans compter et qui constatent ce qu’il faut bien appeler un gâchis phénoménal.

Il appartiendra à nos élus d’opposition du Front de Gauche de se battre et de rassembler pour que tout ne soit pas détruit. Il appartient, aussi, aux Grinerots de prendre en main leur destin et leur avenir.

LC : Vous n’êtes pas amer lorsque vous assistez à ce que vous décriviez ci-dessus.

RB : Amer non. Désabusé, oui. Je savais que l’on ne pouvait pas faire le bonheur des gens malgré eux. Je savais, aussi, que l’honnêteté intellectuelle en politique ne payait pas. Tout cela s’est bien confirmé et m’a permis de prendre énormément de distance au cours des 6 deniers mois.

LC : C’est quoi, le programme pour les 6 mois à venir ou pour les années à venir ?

RB : Plein de choses que je ne dévoilerai pas ici. La création va occuper beaucoup de place dans ma nouvelle vie. Les amis, les vrais, aussi. Et puis, regarder le cirque médiatique et politique, qu’il soit local, national ou international, ça occupe pas mal. Je vais, enfin, pouvoir assister en spectateur éclairé au chaos dans lequel s’est plongé notre monde et à son déclin plus ou moins rapide.

La mise en scène de cette fin du monde qui a commencé en septembre 2001 n’arrête pas de me surprendre. Nous assistons en direct à un péplum en 3D avec des scenarii différends suivant que l’on se trouve à l’Est ou à l’Ouest. Chacun joue sa partition pour intimider l’autre. Les réseaux sociaux sont devenus le lieu ou toutes les mises en scène sont possibles ; où le vrai et le faux se confondent. Le monde est un immense terrain de jeux électronique où le sang coule en vrai mais où, parfois, la mise en scène l’emporte sur le réel. Tout est mélangé. Et la folie des hommes n’a pas de limites.

Alors, vous voyez, je ne vais pas m’ennuyer.

Peut être que je continuerai à commenter cette actualité par écrit, si l’envie s’en fait sentir.

Et puis, regarder le soleil se lever sur les montagnes cévenoles est un spectacle dont on ne se lasse jamais.

LC : Si je comprend bien, vous allez poursuivre le travail que vous menez avec les médias alternatifs, sur le net notamment ?

RB : Poursuivre et amplifier, peut être. Les médias alternatif sont des contre-pouvoirs indispensables qui portent un autre éclairage sur la marche du monde. Le Citoyen, à, lui aussi, toute sa place dans le Sud du département et il conviendra de le faire vivre de belle manière. Le monopole de l’unique titre de la presse locale n’est pas une bonne chose, ni pour la démocratie, ni pour le débat d’idées. Le Citoyen que j’ai créé avec quelques militants en 2005, a dont de beaux jours devant lui. N’en déplaise à ses détracteurs.

LC : Vous aviez publié l’an dernier un ouvrage à la Passe du Vent, intitulé « Sans concession » qui renfermait certains écrits prémonitoires me semble-t-il !

RB : Il s’agissait d’une longue discussion avec Thierry Renard. Alors quand on discute, parfois on se confie, on anticipe, on se penche sur son passé, on envisage l’avenir, etc. Ce fut un exercice passionnant et malgré le boycott médiatique total, l’ouvrage a été pas mal diffusé. C’est important de dire que l’ensemble de la presse régionale a reçu le livre en service de presse et n’a produit aucun article. Un black-out complet qui ne m’a pas surpris mais qui est assez éloquent !

LC : Que doit-on vous souhaiter pour les prochains mois ou les prochaines années ?

RB : Une excellente santé ? Le reste, je l’ai déjà.